A l’origine de ce film documentaire : l’envie, simple mais irrépressible, de voyager et de passer du temps au Tadjikistan. D’octobre à décembre 2024, le cinéaste Romain Arazm chemine dans ce pays enclavé au cœur de l’Asie centrale, caméra à la main, pour capturer des scènes de vie, des paysages, et pour y faire la rencontre d’artistes tadjiks.

L’ambition du film documentaire : restituer les sensations du voyage tout en immergeant le spectateur dans l’Histoire de cette ancienne république soviétique et d’évoquer les défis auxquels elle est confrontée depuis son indépendance en 1992.

D’un rassemblement politique dans la ville de Khodjent jusqu’aux travaux titanesques réalisés par une entreprise chinoise le long de la frontière afghane, en passant par un marché sur un haut plateau du massif du Pamir et des ateliers d’artistes à Duchambé, l’itinéraire choisit par le cinéaste permet de brosser une vue d’ensemble du pays.

L’arrivée dans la région de la dynastie des Samanides au début du IXe siècles contribue à assoir le prestige de la langue et de la littérature persane auprès du peuple tadjik. Cette proximité culturelle se matérialise aujourd’hui dans l’espace publique avec de nombreuses statues monumentales dont celles de l’empereur Ismaël Ier à Khodjent ou celle du poète Roudaki dans un parc de Duchambé.

Cet héritage s’exprime également dans la production artistique, comme on peut le voir avec le travail du peintre et mosaïste Parvin Gulov. Plusieurs de ses œuvres représentent en effet des scènes issues du Shanameh, le Livre des rois, rédigé par le poète persan Ferdowsi peu avant l’an mil.

De la conquête de l’armée tsariste dans la seconde moitié du XIXe siècle, dans le contexte du « Grand Jeu », à l’arrivée des soviétiques dans les années 1920, le rôle que la Russie a joué dans l’Histoire du Tadjikistan est crucial. Il se retrouve dans la mémoire du peuple, dans son imaginaire. Il est abordé dans la trame narrative du film notamment grâce à des tableaux et des images d’archive.

Mais depuis le début des années 2000, c’est au tour de Pékin d’étendre son influence sur le Tadjikistan. Le premier exportateur mondial a investi plusieurs centaines de millions d’euros pour construire des infrastructures le long de la Pamir Highway, cette route mythique traversant le pays et que la caméra du cinéaste suit d’un bout à l’autre. Pour la Chine, l’objectif est double: sécuriser ses frontières occidentales et garantir l’écoulement de ses marchandises par voie terrestre en direction de l’ouest.