Du chant de Sapphô, il ne nous reste que des éclats. Sa poésie nous parvient, après avoir traversé 26 siècles, comme brisée, mutilée. Les découvertes archéologiques peuvent ajouter un mot, une lettre parfois, ou un vers, sa poésie n’en demeure pas moins un lieu d’intermittences et de lacunes que l’imagination tente d’habiter, une voix suspendue ou abîmée que l’on essaie de prolonger, de rappeler à la surface de la page blanche, dans la quête illusoire d’une intégrité impossible. Alors le « livre » de Sapphô est une œuvre en perpétuelle transformation, en devenir, où la citation incertaine, la lettre « restituée », le pointillé ou le commentaire, fondent autour d’une presque absence, un édifice fragile et mouvant, tissé de rêves.