Interdit depuis 1993 en France et en Allemagne, le PKK représente-t-il toujours un danger ? Une plongée au cœur d’un dossier géopolitique complexe, où se mêlent combat pour la liberté, manipulations et pressions.  

Créé en 1978 par Abdullah Öcalan, détenu à vie en Turquie depuis 1999, le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) milite pour la création d’un État confédéral au Moyen-Orient et dénonce l’oppression dont est victime son peuple. Ce combat pour la liberté d’une communauté représentant 35 millions de personnes, dispersées entre l’Iran, l’Irak, la Turquie et la Syrie, attire en Europe la sympathie des mouvements progressistes et d’étudiants d’origine kurde aspirant à renouer avec leurs origines. Environ 1,5 million de Kurdes vivent en Europe (dont un tiers en Allemagne), où les revendications du PKK se sont depuis longtemps exportées. Interdit depuis 1993 des deux côtés du Rhin à la suite d’une vague d’attentats, le parti est classé parmi les organisations terroristes menaçant la sécurité intérieure. Ce mouvement marxiste-léniniste a pourtant tiré un trait sur la violence depuis les années 2000. S’il a repris les armes, c’est pour lutter contre Daech. En 2014, son rôle déterminant dans la levée du siège de Kobané, en Syrie, avec l’appui des Américains, a sauvé la vie de milliers de femmes yézidies et a été salué par les Occidentaux.  

Zone grise   

Malgré ces faits d’armes, la France et l’Allemagne n’ont pas pour autant levé l’interdiction du PKK, qui fait face à de graves accusations, dont celle d’alimenter l’impôt révolutionnaire par le racket et le narcotrafic. En Europe et en Turquie, de nombreux parents lui reprochent d’avoir poussé leurs enfants à la radicalisation pour les enrôler de force. C’est le cas de Maide Aktas, sans nouvelles de sa fille depuis 2019. Confrontant des points de vue opposés, ce documentaire donne la parole aux sympathisants de la cause kurde – dont l’avocat Zübeyir Aydar, qui préside le Congrès national du Kurdistan et réfute toutes les accusations – comme à des repentis et des victimes du PKK, à une enquêtrice allemande spécialisée dans la lutte antiterroriste et à de nombreux experts. Sans trancher dans cet écheveau embrouillé, il nous immerge dans la zone grise entretenue par une nébuleuse d’associations kurdes, les pressions turques pour faire extrader de nombreux réfugiés politiques et la position floue de la France et de l’Allemagne. Offrant néanmoins une photographie très nette de cet imbroglio, il suggère a minima la nécessité d’une clarification du statut du PKK côté européen.

Documentaire de Candan Six-Sasmaz (Allemagne, 2023, 51mn)
Disponible jusqu’au 18/11/2024