Adoptés dans l’enfance à l’étranger, ils se démènent aujourd’hui pour retrouver leurs parents biologiques, dont ils ont été séparés dans l’illégalité. Une enquête glaçante sur les dérives criminelles d’un lucratif commerce et les failles dans la protection des droits des mineurs.

Trentenaires ou quadragénaires, ils sont des milliers, adoptés dans l’enfance à l’étranger, à réclamer la vérité. Certains ont été volés à leur mère au Chili sous la dictature de Pinochet ou en Corée du Sud, précurseur de l’adoption internationale dès les années 1950 – jusqu’à la décennie 1980, la moitié des enfants adoptés à l’étranger dans le monde en étaient originaires. D’autres sont nés de femmes mises enceintes et séquestrées dans des « fermes à bébés » au Sri Lanka, avant d’être vendus. Parfois, leur visa a été falsifié, leur date de naissance ou leur nom, modifié, rendant leur quête pour retrouver la piste de leur filiation aussi douloureuse qu’éprouvante. Un peu partout, ils se heurtent au silence des administrations et à l’inertie de la justice lorsqu’ils se risquent à demander des comptes.

Trafics d’enfants
Si, dans l’imaginaire collectif, l’adoption internationale évoque des enfants abandonnés dans les orphelinats de pays pauvres, nombre d’entre eux ont en réalité été séparés de leurs parents biologiques de manière irrégulière, voire illégale, avec la complicité des autorités des pays d’origine. Grâce aux actions menées par ces adoptés devenus adultes, le film met au jour les abus systémiques perpétrés depuis des décennies, et soulève la responsabilité des pays adoptants. Afin de répondre au désir d’enfant de couples infertiles, l’adoption internationale, véritable marché depuis les années 1980, demeure un monde opaque dont profitent en toute impunité des criminels. Malgré la convention de La Haye sur la protection des enfants – signée ou ratifiée par une centaine d’États depuis 1993 –, et la coopération en matière d’adoption censée l’encadrer, des investigations journalistiques ont révélé ces dernières années la survivance de pratiques sordides – bébés volés, faux orphelins, pressions sur les mères, documents falsifiés – qui favorisent le trafic d’enfants. Nourrie de rappels historiques, d’éclairages apportés notamment par l’universitaire Yves Denéchère, coauteur d’un récent rapport