L’obélisque de la Concorde, ce monument emblématique qui trône fièrement au cœur de Paris, raconte une histoire fascinante de diplomatie, d’ingénierie et de fascination pour l’Égypte ancienne. Son voyage depuis la Haute-Égypte jusqu’à la Place de la Concorde au XIXᵉ siècle est une épopée marquée par des défis titanesques et un esprit d’aventure sans égal.

Tout commence en 1829, lorsque le vice-roi d’Égypte, Méhémet Ali, offre à la France deux obélisques issus du temple de Louxor, en guise de remerciement pour l’aide apportée par les Français dans la modernisation de son pays. Ces obélisques, érigés il y a plus de 3000 ans sous le règne de Ramsès II, symbolisent la puissance et la grandeur de l’Égypte antique. L’idée de ramener un tel trésor en France s’inscrit dans le contexte de l’égyptomanie qui domine alors l’Europe, une fascination nourrie par les découvertes archéologiques de l’époque, notamment grâce à l’expédition de Bonaparte et aux travaux de Champollion sur les hiéroglyphes.

Cependant, transporter un tel monument, pesant plus de 230 tonnes et mesurant près de 23 mètres de haut, représente un défi colossal. C’est finalement l’obélisque occidental, le plus à l’écart, qui est choisi pour être déplacé. L’ingénieur Apollinaire Lebas est chargé de cette entreprise. En 1831, il supervise son démontage minutieux à Louxor, où l’obélisque est délicatement descendu de son piédestal à l’aide d’un ingénieux système de câbles, de poulies et de leviers. Chaque étape demande une précision extrême pour éviter d’endommager ce chef-d’œuvre millénaire.

Une fois démonté, l’obélisque est transporté sur une barge spécialement conçue pour l’occasion, le Louqsor, qui descend lentement le Nil jusqu’à Alexandrie. Là, il est chargé à bord d’un navire qui traverse la Méditerranée et remonte la Seine jusqu’à Paris, après un voyage périlleux marqué par des tempêtes et des obstacles techniques. L’arrivée de l’obélisque en 1833 suscite une immense curiosité. Les Parisiens, fascinés par cette prouesse, affluent pour admirer ce symbole venu d’un autre temps.

L’installation de l’obélisque sur la Place de la Concorde, en 1836, est tout aussi impressionnante que son voyage. Apollinaire Lebas supervise une fois de plus l’opération. Un dispositif complexe de treuils et de contrepoids est utilisé pour ériger l’obélisque sur son piédestal, dans une démonstration d’ingéniosité technique. L’événement attire une foule immense et marque l’aboutissement d’un projet qui a mobilisé des ressources considérables et le savoir-faire de nombreux artisans et ingénieurs.