Article | 1852 – 1903 : Martha Jane Canary, la vraie « Calamity Jane »

Martha Jane Canary, mieux connue sous le nom de Calamity Jane, est née le 1er mai 1852 à Princeton, dans le Missouri. Son père, fervent mormon, éleva ses six enfants avec des valeurs strictes. Martha Jane était l’aînée, entourée de deux frères et de trois sœurs. Jusqu’à son adolescence, sa vie semblait relativement ordinaire, marquée par les responsabilités qui incombaient à l’aînée d’une grande famille. Cependant, le destin de Martha allait prendre un tournant radical en 1865, lorsqu’elle n’était encore qu’une jeune fille de treize ans.

Cette année-là, sa famille prit la décision d’émigrer vers des contrées plus prospères, au Montana, puis à Salt Lake City. Ce voyage épique, qui dura cinq longs mois, changea profondément la jeune Martha Jane. C’est au cours de cette traversée des plaines américaines qu’elle fut initiée aux rigueurs et aux joies sauvages de la vie de trappeur. Contrairement aux filles de son âge, qui restaient souvent en retrait des activités masculines, Martha préférait accompagner les hommes dans leurs expéditions. Elle apprit à chasser, à dresser et à monter des chevaux, montrant déjà un esprit indépendant et audacieux qui la démarquait des autres femmes de l’époque.

Malheureusement, la tragédie frappa sa famille peu après leur arrivée à destination. En moins de deux ans, elle perdit successivement sa mère, puis son père. Orpheline à l’âge de 16 ans, Martha Jane se retrouva livrée à elle-même dans un monde hostile. Mais plutôt que de se résigner, elle embrassa une vie de vagabondage, refusant de se conformer aux attentes de la société puritaine de l’époque.

Une femme hors norme dans un monde d’hommes

Martha Jane, désormais seule, adopta rapidement un mode de vie qui allait susciter autant d’admiration que de réprobation. Elle s’habillait en homme et adoptait des comportements jugés scandaleux pour une femme de cette époque. Dans une société où même le simple fait pour une femme de s’habiller en garçon pouvait entraîner de lourdes sanctions, comme une amende en 1877, Martha défiait ouvertement les conventions. Elle buvait de l’alcool et fréquentait les saloons, des lieux traditionnellement réservés aux hommes, affirmant ainsi son désir de liberté et d’indépendance.

Cherchant toujours de nouvelles aventures, elle se lança dans plusieurs métiers qui lui permettaient de voyager à travers l’Ouest américain. Elle travailla d’abord comme aide pour les ouvriers qui posaient les rails de la Northern Pacific Railroad. Rapidement, elle se fit remarquer par ses compétences et son audace, ce qui la mena à devenir éclaireuse pendant les guerres indiennes, où elle servit sous les ordres de généraux renommés comme Custer et Crook. Jane fut même l’une des premières femmes à pénétrer dans les black hills de l’Arizona, un territoire alors dominé par les Sioux et réputé pour être extrêmement dangereux.

La rencontre avec Wild Bill Hickok et la maternité

Entre ses missions, Martha Jane passait parfois du temps dans la ville de Deadwood, dans le Dakota, un endroit qui allait jouer un rôle central dans sa vie. C’est probablement là qu’elle rencontra la légendaire figure de l’Ouest, Wild Bill Hickok, un célèbre tireur et joueur de poker. Leur relation a fait couler beaucoup d’encre, certains affirmant qu’elle aurait eu une fille avec lui aux alentours de 1873. Toutefois, la véracité de cette information reste entourée de mystère.

Malheureusement, leur histoire prit fin de manière tragique en 1876, lorsque Wild Bill fut abattu lors d’une partie de poker. Cette perte poussa Jane à reprendre sa vie d’errance. Trois ans plus tard, elle se trouvait de nouveau à Deadwood, où elle s’illustra en soignant les victimes d’une terrible épidémie de variole qui ravageait la région. Sa générosité et son courage dans ces moments difficiles renforcèrent sa réputation de femme au cœur aussi robuste que ses talents de cavalière.

Les dernières années d’une légende fatiguée

Avec l’âge, Martha Jane tenta de se poser. En 1885, elle aurait épousé un homme du nom de Charles Burke, et prit la direction d’un hôtel. Cependant, ses récits souvent embellis et son amour pour l’alcool ne cessaient d’alimenter sa notoriété. En 1895, à l’âge de 43 ans, elle fit un dernier retour à Deadwood. Mais à ce moment-là, le Far West tel qu’elle l’avait connu était déjà en train de disparaître, supplanté par la modernité et les changements sociétaux.

Les grandes figures de l’Ouest, à l’instar de Calamity Jane, devenaient des reliques vivantes d’une époque révolue. Beaucoup, y compris Jane, émigrèrent vers l’Est, où ils participaient à des spectacles pour divertir les foules avides d’histoires de l’Ouest sauvage. Martha rejoignit le célèbre Wild West Show de Buffalo Bill, aux côtés d’autres légendes comme Sitting Bull, le grand chef amérindien, qui, lui aussi, se voyait contraint de vendre son image pour subvenir à ses besoins.

Jane continua à s’exhiber dans divers événements, notamment à l’exposition Pan-Américaine de Buffalo en 1901, où elle fit même des altercations physiques avec les forces de l’ordre. Mais son mode de vie débridé et son penchant pour la boisson faisaient d’elle un personnage aussi célèbre qu’encombrant pour les autorités locales.

Une fin digne des légendes du Far West

Finalement, fatiguée par les années d’errance et de combats, Calamity Jane retourna dans le Montana, avec l’aide de Buffalo Bill. Elle s’éteignit le 1er août 1903, à l’âge de 51 ans. Conformément à son souhait, elle fut enterrée au cimetière du Mont Moriah, à Deadwood, à côté de Wild Bill Hickok, scellant ainsi pour toujours leur place dans la grande légende de l’Ouest américain.

Calamity Jane, avec son esprit libre et sa volonté farouche de défier les normes, reste l’une des figures les plus emblématiques de cette époque mythique. Son parcours atypique, entre bravoure, tragédie et exagérations, continue d’alimenter les récits autour du Far West et de ses héros.